Journée de niche Droite Républicaine : vers le logement anti-social ?
Retrouvez mon intervention dans l’Hémicycle contre la proposition de la droite extrême d’exclure les personnes sans emploi de l’accès au logement social.
En France, le logement est un droit.
Avec aujourd’hui onze millions de personnes qui vivent en HLM, le logement social est un outil puissant au service de ce droit. Pour autant, les difficultés pour se loger s’accentuent. Chez moi, dans le Rhône, pour une attribution de logement social, il y a plus de 8 demandes. La situation est grave, mais ne nous trompons pas sur les causes. Bien que transformée lors de son passage en commission, l’intention de cette proposition de loi vise à prioriser l’attribution de logements sociaux aux personnes disposant d’un emploi.
Alors, je le redis. Le logement est un droit. Tous les habitants de ce pays doivent pouvoir se loger dignement, indépendamment de leur statut professionnel. Si nous observons une pénurie d’HLM, ce n’est pas de la faute des chômeurs. C’est la faute à une production insuffisante de logements sociaux et à un marché immobilier qui - non maîtrisé - dysfonctionne, devient inaccessible pour trop de monde et se montre incapable de loger chacun convenablement. Le logement est un droit. Avoir un toit, un chez soi digne, sûr, confortable, pour soi et sa famille, sans non plus y passer tous ses revenus. C’est une base, loin d’être acquise.
En début de semaine, la fondation Abbé Pierre publiait son rapport annuel sur le mal-logement. On y lisait qu’en France, en 2023, plus de 4 millions de personnes étaient mal-logées, plus d’un million étaient privées d’un logement personnel, 330 000 sans domicile. Là où il faudrait une volonté politique forte pour relancer le logement social et dompter le marché immobilier, vous préférez courageusement y répondre en mettant en concurrence les précaires. Concrètement, l’intention initiale de la proposition de loi méconnaît la réalité des demandes et des attributions de logement social.
D’une part, les ménages en activité professionnelle sont déjà surreprésentés parmi les attributions. D’autre part, ils sont déjà prioritaires pour les 920 000 logements sociaux concernés par Action Logement.
De plus, comme le montre le Secours catholique, parmi les demandeurs, les ménages les plus pauvres ont moins de chance que les autres d’accéder à un logement social. Ceux-là même étant - pour des raisons évidentes - ceux qui auront aussi le moins de possibilité d’accéder au logement par le marché privé. L’intention initiale de la proposition de loi viendrait donc consacrer une forme de double peine pour les plus pauvres : privés d’emplois, privés de logement.
Je vous rejoins néanmoins sur un objectif : Il faut pouvoir vivre et travailler au pays. Mais, s’il vous plait, un peu de bon de sens et … un peu décence.
Dans de nombreux bassins d’emplois, les loyers sont trop élevés et ne font qu’augmenter. C’est un problème. Alors, du bon sens, plutôt que de s’attaquer aux chômeurs, encadront la hausse des loyers ! Pourtant, la droite s’y oppose la plupart du temps. Il manque des logements sociaux ? Le bon sens voudrait qu’on en construise davantage ? Qui le refuse, quitte à être hors la loi ? Les maires de droite. A titre d’exemple, dans mon département, le Rhône, l’an passé, la préfecture a dû retirer à 7 communes leur compétence urbanisme. Pourquoi ? Parce qu’elles ne construisaient pas assez de logements sociaux. Le point commun de ces communes ? Être administrées par un maire LR ou de centre-droit. Votre proposition de loi cherche à faire diversion. Elle veut faire croire que la droite est dans le camp du travail. C’est faux. Archi faux. Elle s’oppose à la hausse des salaires et à l'amélioration des conditions de travail.
Prenons un peu de hauteur. Le logement social est un filet de sécurité pour ceux qui ne peuvent accéder au locatif privé. Mais qu’est-ce qui cloche avec le locatif privé ?
Aujourd’hui, la moitié des logements locatifs privés sont possédés par 3,5% des ménages. Chez moi, à Lyon, plus de la moitié des logements mis en location appartiennent à des personnes qui possèdent 5 logements ou plus.
Autrement dit, dans ma ville, où la crise du logement se fait violente, des millionnaires possèdent plus de la moitié du parc locatif privé. Chaque mois, ils s’enrichissent non pas en travaillant mais en recevant une multitude de loyers. S’enrichir sans travailler, ce sont eux que vous devriez appeler les assistés. Ces gens-là s’enrichissent sur la crise du logement. Après le bon sens, la décence.
Cette ultra-concentration n’est pas une spécificité lyonnaise. Les chiffres sont encore plus élevés à Paris ou à Lille. Et après on s’étonnera que les prix grimpent et on demandera à la solidarité nationale de compenser via les APL et logements sociaux. Alors, plutôt que de vouloir vous attaquer aux chômeurs, méditez sur cette hyper-concentration, méditez sur cet accaparement d’un bien commun qu’est le logement.
Ainsi, considérant que le logement, au même titre que l’alimentation, l‘éducation ou la santé, est un droit fondamental auquel chacun doit avoir accès, quelque soit son origine, quelque soit sa nationalité ou quelque soit son statut professionnel et refusant de mettre en concurrence les précaires, le groupe Ecologiste & Social votera contre toute proposition de loi qui irait contre ce principe et réaffirme la nécessité pour notre pays de se doter d’une véritable politique du logement.